jeudi 25 juin 2015

À distance

Alex et Sergi, elle artiste photo, lui enseignant, vivent ensemble depuis sept ans, confortablement installés dans un appartement barcelonais. Un dimanche, après qu'ils ont fait l'amour, Alex apprend qu'elle est invitée en résidence... à Los Angeles. Sergi, qui espérait devenir père, fait la moue, mais, finalement, accepte de la laisser partir pour un an. Un carton-titre. 10.000 km vient de commencer...

Ce long-métrage d'un jeune réalisateur catalan m'en a mis d'emblée plein la vue: de bonne longueur, la scène pré-générique est réalisée sous la forme d'un unique plan-séquence, d'une virtuosité épatante. Le fait qu'ensuite, Alex et Sergi soient (presque) toujours séparés physiquement renforce l'importance de ce lancement et son impact émotionnel. L'autre bonne idée du cinéaste, c'est de s'être contenté de deux acteurs - et personnages - pour raconter cette histoire simple. Difficile de ne pas s'identifier à ce duo en proie aux affres d'un amour compliqué par la distance: les deux protagonistes connaissent en fait une situation qui pourrait nous arriver à tous. Peut-être que certains d'entre vous la trouveront trop archétypale pour être honnête. Moi, 10.000 km a parfaitement su m'embarquer.

Après le brillant plan-séquence inaugural, donc, le film est subdivisé en une suite de petites scènes de la vie quotidienne, en images parfaitement nettes ou captées par l'intermédiaire des webcams qu'Alex et Sergi utilisent pour communiquer. Les passionnés d'Internet seront en terrain familier, devant Skype, Facebook ou Google Maps. Sans tomber dans le piège de la dénonciation facile, le scénario démontre habilement que ces outils, utilisés à outrance, renforcent finalement l'ultra-moderne solitude de ceux qui s'en servent. Constat déjà formulé, certes, mais dressé ici avec tact et, parfois, poésie. Quand nos tourtereaux virtuels dansent avec leurs écrans, la situation ne paraît pas si absurde. 10.000 km nous parle de l'air du temps. Ouverte, sa conclusion semble pourtant devoir céder à l'amertume...

10.000 km
Film espagnol de Carlos Marques-Marcet (2014)

J'imagine que le long-métrage ne connaîtra - au mieux - qu'un succès d'estime, mais je suis heureux que l'Espagne ne soit pas réductible au(x) seul(s) talent(s) de Pedro Almodovar. Je me dois de souligner également que cette histoire d'amour distant m'a fait songer à Her. Les sentiments sont-ils solubles dans la technologie ? La question reste posée. J'ai bien aimé le début de réponse du film d'aujourd'hui.

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