mardi 29 janvier 2013

Tigre et garçon

J'ai commencé par lire le livre. Puis, quelques jours après l'avoir fini, j'ai vu L'odyssée de Pi au cinéma. J'étais sincèrement un peu inquiet avant d'entrer dans la salle, car le roman, jugé inadaptable, m'avait de prime abord moyennement convaincu. Manque de recul, peut-être.

Si vous l'ignorez encore devant votre écran, sachez qu'il est question d'un jeune Indien, élevé à Pondichéry il y a une soixantaine d'années, enfant d'une famille propriétaire d'un zoo. Quand le père, préoccupé par l'avenir des siens, décide d'émigrer au Canada, tout ce beau monde embarque à bord d'un bateau, animaux compris. Un naufrage plus tard, le plus jeune des garçons tâche de survivre dans un canot de sauvetage. Avec lui, Richard Parker, un tigre du Bengale adulte !

Des critiques que j'ai lues vient mon impression que L'odyssée de Pi ne laisse pas indifférent. Les avis sont en général tranchés: on adore ou on déteste. Pour ma part, fidèle à mes habitudes, je suis plutôt dans la nuance, côté positif. Je crois qu'il faut voir cette histoire pour ce qu'elle est: un conte. Bien que pétri de spiritualité, il est notable que le jeune héros du récit nous invite d'abord à croire… ce que l'on a envie de croire. Avec son très improbable nom, Piscine Molitor Patel est lui-même tout à la fois hindou, musulman et catholique ! Heureusement, cet étonnant œcuménisme ne transforme pas le propos du film en profession de foi. Par touches légères, le scénario évoque aussi la question du doute. C'est vrai que, visiblement, il agit ici pour renforcer la conviction en l'existence de Dieu. Chacun reste toutefois libre d'écrire sa propre histoire, la conclusion de l'intrigue principale ouvrant même une autre piste sur la signification de tout ce qui est montré. Le livre est parfaitement respecté sur ce point.

De fait, à ceux qui ont aimé le roman, j'ai envie de conseiller d'aller voir le film. À ceux qui seraient passés à côté, j'indique que le travail cinématographique n'a franchement pas à rougir de la comparaison et qu'il peut donc être un bon remplacement – ou complément. Je reste sur mon idée du conte. L'odyssée de Pi ne s'adresse pas aux cinéphiles 100% cartésiens. Une très large partie de ce qui défile à l'image n'est absolument pas vraisemblable. Qui peut croire qu'un adolescent qui n'a jamais navigué puisse parvenir à gérer une chaloupe en pleine tempête, en si féroce compagnie ? Il faut laisser de côté le réalisme pour mieux plonger dans le rêve. Se laisser porter par l'image. M'est avis que le long-métrage n'aura plus le même impact sur petit écran. La 3D m'a pour une fois semblé magnifier le spectacle, avec des plans numériques aussi improbables que fascinants. Attention: là encore, il s'agit bien d'un océan de pacotille, d'une représentation imaginaire de la beauté du milieu marin ! C'est certainement la raison pour laquelle beaucoup doutaient de la possibilité d'illustrer le roman originel. Bref… moi, j'ai été charmé. Deux fois, finalement. Et, même si c'est partiel et partial, je n'ai pas envie d'évoquer le fait que Yann Martel, l'auteur du livre, se serait lui-même largement inspiré d'un autre écrit d'origine brésilienne.

L'odyssée de Pi
Film américain de Ang Lee (2012)
Même s'il ne fait donc pas l'unanimité, je crois que, de tous ceux que j'ai eu l'occasion de voir désormais, le long-métrage est celui qui fait le meilleur usage de la 3D – plus encore qu'Avatar ! Son mérite aura aussi été de me donner envie de revoir deux autres films d'Ang Lee, cinéaste étonnant de diversité. J'en reparlerai probablement un jour ou l'autre: je garde un excellent souvenir de Tigre et dragon, ainsi que de son film le plus populaire, Le secret de Brokeback Mountain.

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Maintenant, une petite anecdote...
J'ai eu l'impression de beaucoup voir Gérard Depardieu, ces temps derniers. Il a ici un petit rôle - petit mais important. Incontournable ? Si j'ai bien tout compté, il apparaît dans quinze des films chroniqués sur le blog. Seize même, si j'ajoute la voix du coq dans Chicken run. Quand même ! Je ne suis pas fan, mais j'admets que ça en impose !

Ensuite, pour faire contraste...
Pascale ("Sur la route du cinéma") n'a pas aimé du tout !

Et pour finir, une précision...
Le livre, lui, s'intitule L'histoire de Pi (Life of Pi en langue originale).

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