samedi 11 décembre 2010

Une nuit en enfer

Ami(e)s insomniaques... ou pas, bonsoir ! Prévoyant un week-end plutôt speed, j'ai pensé que j'aurais aussi bien fait d'écrire maintenant que de prendre du retard sur les autres choses que j'ai l'intention d'avoir bouclées d'ici lundi. Et en fait, ça ne tombe pas mal du tout: c'est de Eyes wide shut, un film dont l'essentiel de l'intrigue se déroule de nuit, que j'avais l'intention de parler. Une oeuvre jouée sur un rythme relativement lent et qui dure, sachez-le, deux heures et demie. Le point névralgique de ce drôle de récit est un couple. Dans une harmonie apparente, Alice et Bill Harford vivent à New York et y élèvent une petite fille d'une dizaine d'années. Lui est médecin hospitalier, elle amatrice d'art et désireuse d'ouvrir une galerie.

Si vous l'ignoriez encore, il est fort probable que vous les ayez reconnus: Nicole Kidman et Tom Cruise incarnent les personnages. Très vite, le duo fonctionne bien, probablement parce qu'à l'époque, l'Australienne et l'Américain n'étaient pas mariés qu'à l'écran, mais également à la ville. Pas question pour autant d'admirer l'image paisible de deux amoureux: un soir, après qu'elle a partagé un joint avec Bill, Alice lui demande des comptes sur sa fidélité et, grisée, raconte qu'elle a rêvé qu'elle le trompait. Une dispute s'ensuit: Bill quitte le foyer et entame une nuit d'errance dans les rues de la ville. Eyes wide shut devient glauque et le restera en fait jusqu'au bout. Très honnêtement, c'est en fait un peu ce à quoi je m'attendais.

Ce film est un cauchemar baroque. Il s'intéresse d'abord longuement aux agissements de Bill, lequel va notamment participer à une soirée costumée pourtant bien peu fréquentable. Il n'oublie pas pour autant Alice, qui dort du sommeil du juste après ses confidences, semble n'éprouver aucun remords vis-à-vis de son époux, mais n'a même pas le courage d'en tirer toutes les conséquences. Ce qui peut encore réunir ces deux-là ? Probablement le sexe, ce que le scénario n'hésite pas à exprimer de manière plutôt frontale. Cette marche en avant vers la déliquescence des sentiments s'achève certes assez crûment, mais, surprise, sur une note plus évocatrice que vraiment explicite. J'en suis ressorti un peu sonné, pas fasciné, mais surtout admiratif de la performance des deux acteurs principaux. Tout ramène à eux, même s'il y a aussi de bons seconds rôles dans Eyes wide shut. Chose sûre et certaine: personne n'est là pour amuser la galerie.

Eyes wide shut
Film américain de Stanley Kubrick (1999)

Le dernier long-métrage du maître prête le flanc à la controverse. D'aucuns jugent ainsi que la version cinéma - que j'ai pour ma part découverte en DVD - ne correspond pas à la vision du réalisateur, mort quelques semaines avant la sortie de son oeuvre sur les écrans. Allez savoir ! Ce qui est certain, c'est que le tournage à lui seul aura déjà duré plus d'un an: on peut donc penser que le montage n'était pas entièrement terminé. Je n'irais pas jusqu'à dire que ça se voit. Si, compte tenu simplement de sa complexité, il m'est difficile d'affirmer qu'il m'a plu, il est patent que le film m'a au moins intéressé. Il est de ceux qui se plaisent à casser le mythe du rêve américain. À ce titre, je crois pouvoir le rapprocher de Macadam cowboy ou même de Requiem for a dream. D'autres illustrations frappantes et radicales de la sauvagerie de la vie en milieu urbain.

2 commentaires:

Killaee a dit…

tu as oublié a mon sens un thème dénonce dans ce film : les sociétés secrètes...

Remi L. a dit…

C'est surtout un film sur l'exploration des limites : la lassitude d'un couple qui génère cette envie d'écouter ses pulsions, d'aller jusqu'à limite pour regarder ce qu'il y a au-delà... Mais la ligne, il ne la franchit pas (il n'avait sans doute pas l'intention de la franchir de toutes façons).

Le climat créé est très fort, à la limite du rêve, à la limite du dérangeant... Certaines scènes restent gravées dans les mémoires : la cérémonie secrète (avec ses sons retournés), la valse (de la pure virtuosité cinématographique)...

Ah, cela me donne envie de le visionner à nouveau. J'ai un DVD américain, la version où ils ont rajouté des figurines en carton noir pour masquer certains éléments de la scène de l'orgie.... si si, ils l'ont fait! :-))