jeudi 5 janvier 2012

Les liens du sang

Une chronique de Martin

Un cap symbolique est franchi aujourd'hui: celui du 500ème film présenté sur le blog. Voyant l'échéance approcher, je m'étais promis d'évoquer l'une des oeuvres maîtresses du septième art international.

Pour une motivation familiale, et parce que ma chronique est datée du 5 janvier, j'ai choisi de faire un clin d'oeil à un parent et j'ai sélectionné... Le parrain. Le chef d'oeuvre de Francis Ford Coppola débute sur un fondu: j'ai aussitôt pensé à un lever de rideau. Opéra moderne, le film démarre dans le bureau de Don Vito Corleone, chef mafieux qui marie sa fille en ce beau jour de 1945. Comme le veut l'usage du milieu, il ne peut alors rien refuser à ses invités et se voit donc sollicité de toute part. Très belle introduction de personnage.

Pendant pratiquement trois heures, la vie de cet homme et des siens sera au centre de l'intrigue. Le long-métrage s'inspire en cela directement d'un roman de Mario Puzo, crédité comme co-scénariste. Marlon Brando, récompensé d'un Oscar qu'il refusa, prête ses traits, d'abord vifs, puis fatigués, au patriarche-bandit. L'idée intéressante des premières scènes est de démontrer que l'homme a des valeurs. Qu'il ne tue pas à n'importe quel prix et pour n'importe quelle raison. Et que, contrairement à certains jeunes loups issus d'autres familles, il refuse de s'adonner à certaines activités illicites. Il comprend instinctivement que la corruption a des limites et renonce au trafic de drogue, une menace jugée trop lourde sur ses soutiens politiques. Depuis cette situation de départ, Le parrain développe son propos dans de nombreuses directions, tout en le concentrant sur une entité familiale unique. Le scénario réalise un vrai tour de force: placer l'enjeu criminel au coeur d'un petit groupe d'hommes, mettant ainsi en scène non pas une série de délits, mais la destinée versatile d'êtres aux préoccupations "ordinaires". La vie, la mort, la réussite, les choix, les erreurs... le film brasse nombre de ces grands thèmes éternels et universels. C'est en cela que son univers semble familier.

J'ai parlé de Marlon Brando, mais Le parrain donne aussi à admirer d'autres grandes stars du cinéma au travail. Le personnage qui m'a assurément le plus touché est celui de Michael Corleone, dernier fils du pater familias, soldat revenu du front et resté hors du cadre mafieux. Très symboliquement, Francis Ford Coppola l'y ramène presque dès le début du film, son vieux père le réclamant à ses côtés pour une photo-souvenir. Guerre de succession oblige, la relation Vito / Michael apporte au film ses plus belles scènes, ses moments de tension les plus forts. À 32 ans seulement, Al Pacino crève l'écran dans ce qui n'est pourtant que le troisième rôle de sa carrière ! L'intelligence des plans fait le reste et toute l'oeuvre voit se déplacer son centre de gravité, constat qui sera confirmé par les deux suites données à ce premier film. Appréhender cet épisode initial suffit toutefois non seulement à avoir une bonne idée du genre, mais aussi à vivre un grand moment de cinéma. Je m'en voudrais de ne citer aucun des autres comédiens qui y ont contribué, qu'il s'agisse en fait de James Caan, Robert Duvall ou Diane Keaton, pour ne parler simplement que des plus connus. Les historiens du cinéma retiennent que le film aurait tout aussi bien pu être confié à un autre cinéaste et même à d'autres acteurs. Il est de véritables miracles artistiques qui, quarante ans après leur apparition, ont su conserver leur éclat originel. Je ne saurais trop vous conseiller de vous laisser éblouir.

Le parrain
Film américain de Francis Ford Coppola (1972)
Les mythes ne se comparent pas. Chercher un équivalent à ce Graal du cinéma mondial s'apparente à une quête perdue d'avance. Je reste disposé à juger ici des deux suites de ce premier opus, sans être pourtant pressé de les découvrir. J'ai d'autres Coppola "sur le feu". Avant que j'en reparle, certains pourront bien entendu vouloir jeter un oeil à d'autres longs-métrages de la même veine. Je l'ai déjà dit ici même et le répète: de Brian de Palma, L'impasse est devenu l'année dernière l'une de mes références en termes de film de mafia. Un autre volet aussi du grand talent d'Al Pacino, avant peut-être d'enfin découvrir Scarface, de revoir Heat ou de suivre Serpico...

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Pour d'autres opinions sur le film...

Je vous renvoie au blog "L'oeil sur l'écran". Et périodiquement, j'ai prévu désormais de faire référence à d'autres sites et avis cinéphiles. Exemple, sur la trilogie, celui de "Sur la route du cinéma".

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